Après avoir bourlingué en Afrique, c'est à Bordeaux (Gironde) que Brigitte Chevalier a posé ses valises, travaillant au service export de négociants. Elle s'y trouve très vite dans son élément et se prend de passion pour les vins et leurs terroirs. « Plus j'entendais les vignerons parler, plus j'avais envie de me lancer », se souvient cette quinquagénaire au regard bleu azur.
En 2005, c'est décidé : elle sera vigneronne ! Elle fait le choix du Languedoc, plus accessible financièrement. « À Bordeaux, la messe est dite. Le Languedoc, au contraire, c'est une terre de pionniers où il reste beaucoup à découvrir. » Il lui faudra deux ans pour dénicher les parcelles de ses rêves. Car la néovigneronne a des critères d'achat très précis : terroir de schistes, en altitude et orienté plein nord.
« C'est l'avantage de partir de zéro : on n'hérite pas de la parcelle d'un vieil oncle qui ne produit pas forcément les vins dont on rêve. J'ai eu la liberté de sélectionner les vignes que je voulais pour faire les vins que je voulais. »
C'est à Faugères qu'elle trouve son bonheur. Le domaine de Cébène, à Bédarieux, dans l'Hérault, 2 ha au départ, rapidement étendus à 11, progressivement convertis en bio. Les rendements sont faibles, moins de 25 hl/ha, mais les vins sont bien valorisés : 12 euros la bouteille pour le premier prix, 28 euros pour la cuvée haut de gamme, un 100 % mourvèdre vinifié en barriques. « J'explique à mes clients que produire ainsi des vins de terroir est un geste citoyen. Les vignes que j'ai achetées ont été sauvées de l'arrachage. »
Avoir une histoire à raconter
Brigitte Chevalier loue un chai pour ses premières vinifications, une installation sommaire mais suffisante pour travailler correctement. Elle y œuvre toujours dans l'attente de la construction d'un chai « d'ici un à deux ans, si tout va bien ».
Le domaine a ainsi produit 30 000 bouteilles en 2011, le double de l'année précédente. Mais leur commercialisation ne semble pas effrayer la vigneronne, qui a fait ses armes dans le commerce du vin. « Il y a de la place pour des vins de terroir, dans la mesure où on a une histoire à raconter. Il faut faire rêver les consommateurs. Et quand je raconte mon aventure, c'est comme si je partageais ce rêve avec mes clients. »
Sa plus grande surprise
« Je travaille sept jours sur sept, et pourtant, rien ne me porte peine. On est amené à faire tous les métiers : travailler dans les vignes, au chai, faire les formalités administratives, la comptabilité, le commercial... J'ai découvert les autres métiers. Et curieusement, rien ne me déplaît. Je me régale autant à tailler mes vignes qu'à faire ma compta ou à préparer mon plan d'actions commerciales. À chaque étape, c'est moi qui décide. C'est extraordinairement stimulant. Même si en fin de journée, je ressens la fatigue, j'ai le sentiment d'avoir une vie très équilibrée. »