Le lexique juridique définit le groupement foncier agricole (GFA) comme une société civile qui a pour objet de faciliter la gestion des terres dont elle est propriétaire. Cette société peut exploiter personnellement ou donner à bail.
L'article 832 du code civil permet la création d'un GFA à la demande des indivisaires dont le but est de conserver la terre familiale. Dans la pratique, il est fréquent de voir des GFA non exploitants qui signent un bail à long terme (au moins dix-huit ans). Une telle opération a un avantage fiscal considérable (articles 793 et 793 bis du code général des impôts), à savoir : les droits de mutation à titre gratuit (donation et succession) ne sont calculés que sur un quart de la valeur du bien jusqu'à 101 897 euros cette limite est réactualisée le 1er janvier de chaque année - et sur 50 % si cette valeur est dépassée.
La Cour de cassation a validé le montage
Cette solution a un inconvénient : elle entraîne la perte de contrôle du bien loué. Pour bénéficier de la mesure fiscale sans cet inconvénient, l'idée est née de constituer une société civile d'exploitation composée des mêmes personnes physiques que le GFA bailleur. La Cour de cassation a jugé qu'il ne s'agit pas d'un bail fictif. Elle a admis la validité du montage, même si le fisc le conteste (Cour de cassation du 8 octobre 1991).
Autre problème : que faire quand la durée du bail consenti excède la durée adoptée pour la constitution du GFA ? L'article L 322-9 le code rural indique : « Lorsqu'un ou plusieurs des baux consentis par un groupement foncier agricole sont en cours à l'expiration du temps pour lequel il a été constitué, le groupement est, sauf opposition de l'un de ses membres, prorogé de plein droit pour la durée restant à courir. » Le texte précise que les statuts ne peuvent pas déroger à la possibilité de s'opposer à la prorogation. Aux termes de l'article 1845-6 du code civil, la prorogation est décidée à l'unanimité, mais les statuts peuvent prévoir une autre règle et indiquer que la décision peut être prise à la majorité. Dans ce cas, les conditions pour réunir cette majorité doivent être précisées. On sait que les statuts des sociétés prévoient les majorités aptes à prendre des décisions pour le gouvernement de la société : majorité ordinaire ou bien majorité extraordinaire (définie par le nombre de voix nécessaires), voire unanimité pour les décisions les plus graves (dissolution de la société…). Deux arrêts de la Cour de cassation, l'un daté du 4 février 2009, l'autre du 28 septembre 2011, se penchent sur ce problème de la durée de vie du GFA par rapport à celle des baux qu'il consent. L'arrêt du 4 février 2009 relève que, selon les statuts, les décisions qui tendent à modifier le pacte social doivent être prises par une assemblée extraordinaire. Or, pour les juges, il en est ainsi pour la conclusion d'un bail prévu sur vingt-quatre ans alors qu'en l'espèce la durée du GFA n'était que de vingt ans. Seule la majorité extraordinaire pouvait consentir un bail à échéance plus lointaine que celle de la société. Dans l'arrêt du 28 septembre 2011, l'analyse est tout autre. Il s'agissait de savoir s'il fallait ou non annuler un bail consenti par un gérant pour une durée supérieure à celle du groupement. La cour d'appel avait considéré que le gérant, en signant un bail excédant la durée du GFA, avait dépassé ses pouvoirs. La cour suprême a censuré cette décision. Elle a décidé que la conclusion d'un bail d'une durée supérieure à celle du GFA entre dans l'objet social du groupement. On le voit, la jurisprudence n'est pas fixée…