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VIGNE - POUR APPROFONDIR

Des jus à hauts rendements

Frédérique Ehrhard - La vigne - n°251 - mars 2013 - page 42

Le programme de recherche Fijus-R@isol vise à créer une filière spécifique à la production de jus de raisin. Voici les premiers résultats.
L'EXALTA est le cépage utilisé pour les expérimentations du projet Fijus-R@isol. Ce programme de recherche est piloté par l'entreprise Foulon-Sopagly, en partenariat avec l'Inra et l'ICV. © BIOSPHOTO/ MARK BOLTON/GAP

L'EXALTA est le cépage utilisé pour les expérimentations du projet Fijus-R@isol. Ce programme de recherche est piloté par l'entreprise Foulon-Sopagly, en partenariat avec l'Inra et l'ICV. © BIOSPHOTO/ MARK BOLTON/GAP

Des vignes produisant 300 à 350 hl/ha, ce n'est pas une utopie ! Ces rendements, l'Institut coopératif du vin (ICV) les a obtenus en 2011. Sauf qu'il ne s'agit pas de vin, mais de jus de raisin. L'ICV travaille avec l'Inra au sein du projet Fijus-R@isol, piloté par Foulon-Sopagly, une entreprise qui produit du jus de raisin. Tous trois cherchent à définir des itinéraires techniques pour produire des jus adaptés à la demande, avec de hauts rendements et un coût compétitif.

Dans ce cadre, l'ICV a implanté en 2009 une parcelle de 50 ares chez Jean-Pierre Falcou, adhérent à la coopérative de Puichéric, dans l'Aude. « Nous y testons trois modes de conduite : la taille rase, la non-taille et la haie fruitière », détaille Jacques Rousseau, responsable des services viticoles de l'ICV.

Une fois les cordons installés sur le fil porteur, il n'y a plus d'intervention manuelle. Aucun relevage n'est prévu. « Pour la haie, nous installons deux étages supplémentaires de cordons au-dessus du premier en deux ou trois ans. Un rognage en hiver permet de maîtriser le volume », précise-t-il.

Des cépages spécifiques

La parcelle est irriguée, avec une partie fertilisée au sol et l'autre en fertirrigation. Elle est plantée d'exalta, un cépage blanc de raisin de table. En 2011, le témoin, conduit en guyot simple, a porté 19 t/ha de raisins, contre 40 à 45 t/ha pour les trois modes testés, ce qui correspond à une production de 300 à 350 hl/ha. En 2012, avec un climat moins favorable, le témoin n'a porté que 14 t/ha, alors que les trois modes ont produit de 15 à 20 t/ha.

À ce niveau de rendement, les jus obtenus contiennent 140 g/l de sucres, contre 160 g/l dans les jus du commerce, et gagnent en vivacité. C'est un progrès, mais cela ne suffit pas. Pour mieux coller à la demande, Foulon-Sopagly a besoin de disposer de jus provenant de cépages aux aptitudes différentes. Il a défini cinq profils : faible ratio sucre/acidité, blancs à très gros rendement, rouges très colorés, blancs et rouges aromatiques et cépages résistants à conduire en bio.

« Pour trouver des cépages répondant à ces critères, nous avons pressé les raisins de 600 variétés en collection au domaine Inra de Vassal, dans l'Hérault, et dégusté leurs jus, explique Jean-Louis Escudier, de l'Inra de Pech Rouge, dans l'Aude. Après plusieurs étapes, nous en avons retenu dix. Leur qualité gustative est vraiment excellente ! » Trois cépages résistants issus du programme de sélection d'Alain Bouquet ont également été mis en observation.

Pas de droits de plantation nécessaires

Les premières inscriptions au catalogue sont attendues pour 2015 ou 2016. D'ici là, plusieurs parcelles expérimentales de quelques hectares vont être implantées pour cerner le potentiel de chaque cépage et le mode de conduite le mieux adapté. Ces cépages, destinés uniquement à la production de jus de raisin, ne nécessiteront pas de droits de plantations. Mais, dans un premier temps, ils ne seront disponibles que dans le cadre d'un contrat signé avec Foulon-Sopagly.

À la recherche de jus riches en polyphénols

Pour améliorer l'extraction des polyphénols, qui ont des propriétés antioxydantes, l'Inra de Pech Rouge, dans l'Aude, a testé plusieurs méthodes de chauffage, en association avec des enzymes. « C'est la flash-détente qui donne les meilleurs résultats », souligne Jean-Louis Escudier, de l'Inra. Le progrès viendra aussi des cépages. Parmi ceux qui ont été sélectionnés, l'un d'eux contient cinq à six fois plus de polyphénols que l'alicante teinturier. Il va être utilisé pour élaborer les jus nécessaires à une étude santé que l'Inserm de Dijon va mener en 2014.

Des contrats de dix ans

« Dès que des cépages seront inscrits au catalogue, nous proposerons des contrats aux vignerons qui souhaitent s'engager dans la filière jus de raisin », affirme Aurélie Sivry, responsable qualité chez Foulon-Sopagly et coordinatrice du programme Fijus-R@isol. Le contrat définira un revenu minimum garanti que le vigneron pourra dépasser s'il produit plus que le rendement de base du cépage. Il prévoira un accompagnement technique et sera établi sur dix ans. Les vignerons pourront amortir leur plantation et Foulon-Sopagly s'assurera dans la durée d'un approvisionnement régulier en volume et en qualité. « Avec une dizaine de cépages, nous disposerons d'une palette pour assembler des jus répondant aux attentes de nos clients. Actuellement, la demande stagne car les consommateurs trouvent le jus de raisin trop sucré. En levant ce frein, nous comptons bien regagner des parts de marché. »

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