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« Je parle de mes vins avec passion »

CHANTAL SARRAZIN - La vigne - n°261 - février 2014 - page 50

SÉBASTIEN MICHELAS participe tous les ans au Marché aux vins d'Ampuis (Rhône), prisé des Lyonnais. Il y présente ses bouteilles avec ardeur et simplicité pour donner envie aux visiteurs de les goûter.
SÉBASTIEN MICHELAS, À DROITE,  commence toujours par expliquer aux nouveaux visiteurs qui s'arrêtent sur son stand qu'il travaille en famille au domaine. Il a remarqué que les gens sont sensibles à cette information. PHOTOS J.-F. MARIN

SÉBASTIEN MICHELAS, À DROITE, commence toujours par expliquer aux nouveaux visiteurs qui s'arrêtent sur son stand qu'il travaille en famille au domaine. Il a remarqué que les gens sont sensibles à cette information. PHOTOS J.-F. MARIN

AVANT LA RUÉE, le vigneron a installé ses vins sur le comptoir et soigneusement trié ses cartons. « Nous mettons les crozes-hermitage rouges en première ligne, car ce sont eux que nous vendons le plus. »

AVANT LA RUÉE, le vigneron a installé ses vins sur le comptoir et soigneusement trié ses cartons. « Nous mettons les crozes-hermitage rouges en première ligne, car ce sont eux que nous vendons le plus. »

À 11 H 30, LE SALON FAIT LE PLEIN DE VISITEURS. Le stand de Sébastien Michelas est pris d'assaut.

À 11 H 30, LE SALON FAIT LE PLEIN DE VISITEURS. Le stand de Sébastien Michelas est pris d'assaut.

QUAND LES DÉGUSTATIONS S'ENCHAÎNENT, le plus difficile est de servir tout en établissant les bons de livraisons et les préparations de commande. Pas question de se tromper !

QUAND LES DÉGUSTATIONS S'ENCHAÎNENT, le plus difficile est de servir tout en établissant les bons de livraisons et les préparations de commande. Pas question de se tromper !

Lundi 20 janvier, 9 heures. Quatrième et dernier jour du Marché aux vins d'Ampuis, dans le Rhône. Sébastien Michelas se prépare à un nouveau marathon. Laurent, le commercial du domaine, est venu lui prêter main-forte. « Nous l'avons recruté en 2011 pour développer le circuit traditionnel, commente le vigneron à la tête du domaine Michelas Saint-Jemms avec ses soeurs, à Mercurol (Drôme). Le lundi, il y a toujours plus de cavistes, d'agents et de restaurateurs sur ce salon. De plus, il parle parfaitement anglais, ce qui n'est pas mon cas ! »

En attendant les premiers visiteurs, Sébastien vérifie ses cartons, rangés derrière le stand. « Nous mettons les crozes-hermitage rouges en première ligne, explique Sébastien, car ce sont eux que nous vendons le plus. Nous les séparons des crozes-hermitage et des saint-joseph blancs afin d'éviter les confusions. Nous gagnons ainsi du temps quand il y a du monde et que nous devons servir rapidement les clients. »

À Ampuis, les visiteurs, masculins en majorité, viennent de Lyon, de ses environs, d'Isère et de Savoie. Ici, le panier moyen varie entre 100 à 150 euros par personne. « Il s'agit d'amateurs éclairés. Ils connaissent nos appellations. Ils n'ont pas besoin que nous les situions géographiquement, contrairement aux salons qui se tiennent à Paris ou à Strasbourg, par exemple », enchaîne Sébastien.

Sur son stand, il présente onze vins : trois crozes-hermitage, deux saint-joseph, deux cornas et un hermitage rouges ainsi que deux crozes-hermitage et un saint-joseph blancs. Les prix vont de 10,50 euros pour la bouteille de crozes-hermitage rouge à 50 euros le col de cornas Terres d'Arce. « Nous proposons un nouveau millésime chaque année pour que les clients puissent s'y intéresser même s'ils ont encore l'année précédente en cave », précise le viticulteur. Quant au stand, son prix dépend du nombre d'invitations que les exposants commandent : 1 080 euros pour 100 cartons d'invitation, 1 200 euros pour 300 cartons.

9 h 45. Les allées du salon sont encore clairsemées. Un couple se présente. « Vous connaissez notre domaine ? » questionne Sébastien. Ils répondent par la négative. « C'est une exploitation familiale. J'y travaille avec mes trois soeurs. Nous cultivons cinquante hectares et nous produisons quatre crus de la vallée du Rhône », leur dit-il alors.

En aparté, il nous confie : « Je commence toujours par poser cette question. Si les gens ne nous connaissent pas, je leur explique que nous travaillons en famille, car ils y sont sensibles. » Il demande ensuite aux visiteurs quels vins ils désirent goûter. « On ne peut pas tout faire déguster, précise-t-il. J'essaie donc de cerner le style de vin qu'ils recherchent : blanc, rouge, à boire immédiatement, à garder, à consommer avec des amis, pour une occasion spéciale, etc. Puis, je les oriente. Quand on prend en compte ces besoins, les clients se montrent toujours plus réceptifs. »

10 h 30. La foule grossit. Sébastien et Laurent commencent à enchaîner les dégustations. Ils ne sont pas trop de deux pour tenir le rythme. « Le plus difficile, assurent-ils, c'est de continuer à faire déguster et, en même temps, de noter les adresses de chaque client, d'établir les bons de livraison, puis de préparer les commandes. Surtout s'il y a des panachages ! »

Quatre habitués du domaine se tiennent devant le stand. Ils connaissent les rouges. Aujourd'hui, ils veulent découvrir les blancs. « Je préfère les blancs dans leur jeunesse, leur annonce Sébastien. Alors, je les vinifie dans le but de les apprécier tôt. Ce ne sont pas des vins de garde. »

Il leur sert d'abord son crozes-hermitage 2012, « 60 % roussanne, 40 % marsanne, sur des terroirs argilo-calcaires et granitiques, poursuit-il. C'est un vin floral, élégant et festif ! Il est fait pour accompagner une tapenade, une anchoïade, un caviar d'aubergine... ». Il poursuit avec le saint-joseph en glissant une anecdote : « C'est un 100 % marsanne. Ce sont des vignes que mon père a plantées en 1986. Il est différent du premier, plus fin, plus raffiné. Celui-là, je le conseille sur des saint-jacques poêlées. » Les quatre amis opinent du chef. Plus tard, ils reviendront faire leurs emplettes.

« Quand je commente mes vins, je me vois dans mes vignes et dans ma cave, nous avoue-t-il. J'en parle avec une passion que j'essaie de faire partager. » Il a aussi l'art de suggérer des mises en scène. À Michel et Yoann, deux habitués du domaine venus déguster ses cornas, il prodiguera le conseil suivant : « C'est un vin qui peut attendre entre six et dix ans, voire au-delà. Quand on fait l'effort de le garder ainsi, autant l'apprécier à 100 %. Sortez de grands et beaux verres de préférence et ouvrez-le dès l'apéritif ! Quand on passe à table après avoir bu d'autres boissons, les papilles sont saturées. » Avec ces mots, il attire l'attention des autres visiteurs du stand. Tous sont sous le charme.

Puis Sébastien fait déguster Fleur de Syrahne 2012, sa dernière cuvée de crozes-hermitage rouge. « Elle provient de vignes qui ont une dizaine d'années, leur expose-t-il. Elle a du croquant, du fruit et de la gourmandise. » Il complète par la petite recette qui convient : « Une salade de gésiers au vinaigre de framboise. »

Noël et Christiane, un couple de retraités, sont venus pour La Chasselière, la cuvée phare du domaine en crozes-hermitage rouge. « Il ne nous en reste plus beaucoup en cave », annoncent-ils. Sébastien en profite pour rebondir : « De quel millésime ? » « 2010 », répond Noël. « Vous pouvez encore l'attendre et passer directement au 2011 que je viens de vous servir. C'est une année moins structurée. » L'argument convainc les deux visiteurs. Le couple repart avec un carton de 2011. À ceux qui ne connaissent pas cette cuvée, il recommande de l'accompagner d'un pot-au-feu ou d'un coq au vin.

11 h 30. Le stand fait le plein de visiteurs. « On pare au plus pressé, observe Sébastien. On approfondit moins le discours. » Pas question, en effet, de se tromper dans les commandes. Il prend quand même le temps d'expliquer les différences entre ses cuvées. S'agissant de ses deux cornas, il détaille : « Pour ma cuvée Les Murettes, je vendange tardivement pour obtenir des notes de pruneau, de garrigue et de cerise à l'eau-de-vie. Pour Terres d'Arce, ma cuvée prestige, nous ne laissons que cinq à six raisins par grappe, nous l'élevons en fût neuf à 80 % et nous sélectionnons les meilleurs pour composer la cuvée. »

Le salon, c'est aussi du relationnel. Damien, un client restaurateur, vient lui rendre visite. Il déguste les derniers millésimes en blanc tout en discutant rugby avec son hôte. Il a à sa carte les crozes-hermitage rouges et blancs du domaine. « Je vais t'en recommander pour réactualiser le millésime, annonce-t-il au vigneron. Cette année, j'ai manqué de blancs ! »

À l'issue des quatre jours, le bilan est positif. « 250 personnes nous ont acheté du vin, décompte Sébastien, qui préfère rester discret sur le volume de ses ventes. Ce chiffre est équivalent à celui de l'an passé. Nous avons également eu des contacts avec plusieurs cavistes et agents. » Ayant rentabilisé sa participation, il a déjà prévu de revenir en 2015.

TOUT BÉNEFS' DE L'ORGANISATION, DU SAVOIR-FAIRE ET QUELQUES CONSEILS DE DÉGUSTATION

>> Des accords mets et vins. Sébastien Michelas propose toujours une recette précise, simple et populaire, pour accompagner ses vins : une salade de gésiers, un coq-au-vin, etc.

>> De la technique, mais pas trop. Le vigneron évoque les cépages et la vinification mais insiste surtout sur ses objectifs : des vins blancs à boire jeune, des rouges « du Sud » avec des notes de pruneau, de garrigue et de cerise à l'eau-de-vie.

>> Des indications sur la durée de garde. Un conseil précieux pour les consommateurs. Certains viennent voir Sébastien pour savoir quand ils peuvent boire les vins qu'ils ont déjà achetés.

>> Une gamme claire. Le domaine Michelas élabore dix cuvées. En rouge, il propose trois crozes-hermitage, deux saint-joseph, deux cornas et un hermitage. Dans ces trois appellations, la cuvée la plus prestigieuse s'appelle Terres d'Arce : petits rendements, élevage en fûts, puis sélection. Les clients comprennent facilement.

>> De la préparation. Sylvie Chevrol, la soeur de Sébastien, a préparé le salon. Elle a envoyé 700 courriers à tous les clients des cinq dernières années. Aux 300 meilleurs clients, elle a offert une entrée gratuite.

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