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DOSSIER - Oïdium : mobilisation générale

Une maladie difficile à modéliser

INGRID PROUST - La vigne - n°264 - mai 2014 - page 25

Les sociétés Bayer et Promété, plus modeste, ont chacune développé un modèle de prévision du risque oïdium. Ces outils informent les viticulteurs de l'urgence de traiter. Tous deux doivent encore être améliorés.
« L'OÏDIUM EST UNE MALADIE PLUS COMPLEXE QUE LE MILDIOU, elle est de ce fait plus difficile à modéliser », reconnaît Renaud Grasset, de Bayer, dont l'outil Movida est encore perfectible. L'oïdium est aussi plus compliqué à détecter, comme en témoignent ces symptômes précoces discrets sous les feuilles.  ©  PTE CIVC

« L'OÏDIUM EST UNE MALADIE PLUS COMPLEXE QUE LE MILDIOU, elle est de ce fait plus difficile à modéliser », reconnaît Renaud Grasset, de Bayer, dont l'outil Movida est encore perfectible. L'oïdium est aussi plus compliqué à détecter, comme en témoignent ces symptômes précoces discrets sous les feuilles. © PTE CIVC

L'an dernier, Bayer a lancé Movida, le premier modèle de prévision des risques oïdium et mildiou indiquant quand renouveler les traitements. « L'utilisateur renseigne le produit et la dose qu'il a appliqués, détaille Renaud Grasset, responsable des outils d'aide à la décision au sein de la firme. À l'aide des données climatiques, le modèle calcule le risque de maladie. Il prend en compte le stade et la sensibilité de la vigne. En fonction de toutes ces informations, il gère le renouvellement des traitements. »

Movida informe si la vigne est toujours sous la protection du dernier traitement réalisé ou s'il faut le renouveler. Le modèle permet aussi de se projeter dans le temps, puisqu'il intègre les prévisions météo à six jours.

Bayer vend cet outil à ses distributeurs qui le commercialisent auprès leurs propres clients. Ainsi, cette année, « plusieurs centaines de viticulteurs vont l'utiliser pour plusieurs milliers de parcelles », soutient Renaud Grasset. Cependant, l'entreprise reconnaît volontiers que le modèle oïdium n'est pas encore aussi abouti que celui du mildiou. « Le risque oïdium a tendance à être surévalué dans certains cas. C'est une maladie au comportement plus complexe que le mildiou. Elle est de ce fait plus difficile à modéliser. Mais nous continuons à améliorer Movida tous les ans. »

À l'ombre du géant Bayer, Promété, une petite société basée à Narbonne (Aude), tente elle aussi sa chance. Elle a mis au point son propre outil d'aide à la décision pour la lutte contre l'oïdium, dont elle la lancé la commercialisation au Sitévi l'an dernier.

Indicateurs de risque

Le dispositif fonctionne à partir d'une station météo Promété pourvue de capteurs de température, d'humidité relative et d'humectation foliaire ainsi que d'un pluviomètre. Cette station communique ses données sur le site web Agroclim, où le vigneron indique le stade phénologique de sa vigne et l'historique oïdium de ses parcelles.

« Notre outil d'aide à la décision (OAD) utilise toutes ces données météo pour modéliser le développement de l'oïdium, explique Édouard Loiseau, fondateur de Promété. Nous avons défini des seuils d'intervention en fonction des cépages et des stades phénologiques à partir de données d'observations recueillies sur des centaines de parcelles avec témoins non traités. »

L'OAD délivre des indicateurs de risques sous la forme de diagrammes. « Lorsque le niveau de risque croise le seuil d'intervention, le traitement doit être réalisé, note Édouard Loiseau. Le vigneron sait avec certitude s'il peut ou non retarder le premier traitement. Au cours de la saison, si la pression est faible, le modèle indique la possibilité de décaler les interventions. Le viticuletur peut ainsi faire des économies. » Promété vend la station météo 3 000 euros HT pièce, ou la loue pour 800 euros par an, et facture 150 euros par an l'abonnement à son modèle.

Un outil intéressant

Pour François-Jérôme Prioton, vigneron à Rouillac (Charente), Promété est un outil intéressant. « Il me permet de raisonner ma stratégie à partir de données météo objectives provenant de mes propres vignes. Je vois si je peux reporter un traitement ou si je dois intervenir plus tôt que prévu. Les données météo sont réactualisées toutes les heures. En 2013, j'ai réalisé neuf passages contre l'oïdium, alors que mes voisins en ont fait douze. J'applique aussi le programme Optidose et Promété me sécurise dans cette pratique. Il est en outre facile à comprendre. »

Certains techniciens ont un avis bien plus mitigé. « Promété nous fournit de belles données de sporulation, mais cela reste difficile à interpréter », constate Fabrice Guillois, de la chambre d'agriculture de l'Aude.

Nicolas Constant, de Sudvinbio, est encore plus sévère. « Promété oïdium n'a pas donné de résultats probants l'année dernière, regrette-t-il. Il a mal pris en compte la forte pression. Lorsqu'il a préconisé le premier traitement, les premiers symptômes étaient déjà visibles. » Malgré cela, l'ingénieur expérimente à nouveau l'outil cette année. « Nous avons une démarche d'amélioration continue auprès de techniciens qui testent le modèle jusqu'à ses limites », confie Édouard Loiseau.

Face au scepticisme des experts, ce dernier annonce avoir enregistré « 100 % de renouvellements d'abonnements pour cette année ». Preuve que les utilisateurs sont, sinon satisfaits, au moins toujours confiants dans le potentiel de Promété.

L'IFV mise sur les radars de pluies

« Nous travaillons avec le réseau Antilope de Météo France, qui nous fournit les relevés de ses stations météo et des données provenant de radars pluviométriques qui localisent les pluies à l'échelle du kilomètre carré », indique Marc Raynal, ingénieur en charge de la modélisation à l'IFV. Les modèles peuvent ainsi mieux intégrer la variabilité des pluies sur de courtes distances pour mieux refléter les réalités du terrain. Leurs prévisions s'en trouvent améliorées. S'agissant de l'oïdium, Marc Raynal observe lui aussi quelques difficultés. « Il est délicat de cerner les premiers indices, les contaminations primaires, d'une épidémie au début du printemps. Mais le modèle Potentiel Système que nous utilisons donne des tendances intéressantes sur le risque éventuel de développement de la maladie et l'évaluation globale des attaques. »

Cet article fait partie du dossier Oïdium : mobilisation générale

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