Retour

imprimer l'article Imprimer

GÉRER - Interview

YVES LE GUAY, FORMATEUR EN RELATIONS HUMAINES « L'émergence d'un leader est bénéfique »

PROPOS RECUEILLIS PAR AUDE LUTUN - La vigne - n°269 - novembre 2014 - page 100

Pour ce spécialiste, un leader est nécessaire pour instaurer des relations de travail harmonieuses et efficaces entre les associés.

Yves Le Guay est consultant formateur en relations humaines et en organisations chez Triade-Conseil, à Lyon (Rhône) et accompagne les groupes professionnels depuis plus de vingt ans. Il rappelle que la bonne entente entre associés repose sur des règles précises.

Que faut-il pour qu'un groupe marche bien ?

Yves Le Guay : Un objectif commun, une identité reconnue, des règles respectées, un leadership identifié, des compétences dans tous les domaines d'activité de l'entreprise et une organisation où chacun trouve sa place.

Vous parlez de leadership. Est-ce souhaitable qu'il y ait un leader entre des associés ?

Y. LG. : Très souvent, un leader se détache naturellement. Surtout dans un groupe d'au moins trois personnes. C'est normal et ce n'est pas un problème. Si on reconnaît que telle personne, par ses compétences et sa personnalité, est leader, on peut lui dire ce qu'on attend d'elle. Le leader est au service du groupe. C'est une responsabilité exigeante car on lui demande beaucoup. Être leader, cela se construit, ce n'est pas totalement inné. Il est souhaitable que les autres associés l'incitent à suivre des formations pour qu'il améliore son leadership. Tout le groupe en bénéficiera.

Quelles sont les bases d'une bonne entente entre associés ?

Y. LG. : La bonne entente se caractérise par quatre points. D'abord, la coopération. Chacun est au service de la réussite de l'autre et il n'y a pas de compétition. Le second point est l'autonomie entre les associés, ce qui n'exclut pas l'interdépendance. Vient ensuite l'intimité ou la proximité. On est proche les uns des autres et on est capable d'exprimer ses pensées ou ses émotions sans être jugé. Le dernier point est la régulation. Tout système a besoin de règles. La régulation permet de traiter les tensions quand elles se présentent.

Vous insistez également sur l'importance des signes de reconnaissance ?

Y. LG. : Le monde agricole n'est pas très habitué aux signes de reconnaissance, qui montrent pourtant à l'autre qu'il existe à nos yeux. C'est important de savoir dire à son associé qu'on apprécie ce qu'il fait, ce qu'il a réussi, etc. On peut aussi lui dire ce qui ne va pas. C'est également un signe de reconnaissance. Le non-dit est le principal écueil des groupes. On peut taire une remarque par peur de blesser ou de montrer ses émotions. Souvent, on se dit que cela n'a pas d'importance. C'est oublier que l'essentiel de la communication passe par le non-verbal et que l'autre perçoit que quelque chose ne va pas. Si l'on n'interroge pas son associé sur la raison du malaise que l'on sent chez lui, on entre dans une relation fausse, non authentique.

Il est assez fréquent que deux frères soient associés. Est-ce risqué ?

Y. LG. : L'association de deux frères est la plus difficile car ils sont de la même génération. Entre frères, on traîne les « casseroles » de l'enfance, avec ses coups bas, ses épisodes douloureux mais aussi ses bons souvenirs. L'enfance, c'est un moment de compétition qui permet de se construire, mais qui laisse aussi des traces. Si l'on n'a pas traité ces cicatrices, elles vont se rouvrir pendant l'association. Mais il n'y a pas de fatalité, les blessures de l'enfance peuvent se guérir. Deux frères ne sont pas non plus obligés de travailler ensemble, même s'il peut exister une pression familiale en ce sens.

Et travailler en couple ?

Y. LG. : Les qualités que l'on recherche chez un conjoint ne sont pas nécessairement les mêmes que celles recherchées pour un associé. Il faut se montrer très prudent quand on s'associe entre conjoints. Des tensions dans le couple peuvent avoir des répercussions sur le travail et réciproquement. Cela peut être formidable comme détestable. Cela amplifie les risques mais dope les chances.

Faut-il se voir assez souvent pour faciliter la communication ?

Y. LG. : Oui. Le groupe n'existe que quand les associés sont ensemble. Si on peut se voir tous les jours, c'est bien. L'idéal est de ne pas dépasser une semaine sans se voir. Quand les réunions s'espacent, c'est le signe que les relations se détériorent car on n'a plus envie de se rencontrer. Je connais deux frères associés qui prennent le café ensemble tous les matins et qui disent : « C'est le moment où l'on se dispute et où l'on se réconcilie ! » La bonne entente est une condition de la réussite économique de l'exploitation. La bonne entente, c'est un chemin. On ne l'atteint pas en un seul jour !

Cet article fait partie du dossier

Consultez les autres articles du dossier :

L'essentiel de l'offre

Voir aussi :