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Ludovic, chargé de communication « Si j'achète sans conseil, comme c'est le cas en GD, la médaille prend du poids » P. TOUCHAIS
Jean-François, chef d'entreprise en agroalimentaire « Par nature et de par ma profession, je suis d'abord sensible aux AOC. » P. TOUCHAIS
Aurore, paysagiste « J'achète mes vins chez les vignerons et chez des cavistes. Les médailles, je ne m'en occupe pas. » P. TOUCHAIS
Damien, enseignant « Je ne sélectionne pas les vins parce qu'ils ont reçu des médailles. Je fonctionne au bouche à oreille. » P. TOUCHAIS
Aurélien, ingénieur « C'est surtout le bouche à oreille qui m'oriente vers un producteur. Et le prix » P. TOUCHAIS
Gaétan, infographiste « Je suis assez sensible aux médailles. Ainsi, je consulte les palmarès. Mais cela n'oriente pas mes achats. » P. TOUCHAIS
Àvoir le nombre des concours croître de millésime en millésime, on se dit que les médailles font vendre. Mais qu'en pensent les consommateurs ? S'y retrouvent-ils dans cette forêt de concours, avec son lot de macarons, diplômes et trophées ? Ces distinctions guident-elles leur choix ? Le 29 mai au soir, à Angers, Interloire organisait une dégustation pour le grand public des vins d'Anjou-Saumur, médailles d'or de l'édition 2015 de son concours interprofessionnel des vins du Val de Loire. L'occasion pour La Vigne de sonder les consommateurs présents ce jour-là sur ce qu'ils pensent de ces récompenses.
Et d'abord quels concours connaissent-ils ? Réponse unanime : le concours général agricole. Les six consommateurs qui ont répondu à nos questions, ce 29 mai, le connaissent tous, et abrègent son nom en « concours agricole ». « Je connais le concours agricole pour les vins bien sûr, mais aussi pour d'autres produits », indique Jean-François, la quarantaine, chef d'entreprise dans l'agroalimentaire. J'ai aussi en mémoire un concours à Mâcon, mais je ne connais ni sa réputation ni son niveau. »
Outre le concours général agricole, Aurore mentionne Féminalise. « Je connais ce concours parce qu'un vigneron chez qui j'achète du vin y a été sélectionné », précise cette jeune paysagiste. De même, Gaétan, infographiste indépendant, est capable de citer la sélection « Un vin presque parfait », car un vigneron de sa connaissance a obtenu cette distinction pour un de ses vins. Il évoque également spontanément le concours des Vignerons indépendants et celui d'Interloire, qui organise la soirée.
Autre consommateur plutôt aguerri en la matière : Damien, enseignant. À la question posée, il répond sans hésitation : « Le concours agricole et aussi le concours des Ligers [concours de l'Union des oenologues du Val de Loire, NDLR] et j'ai découvert aujourd'hui même l'existence d'un concours des crémants, parce qu'un vigneron m'en a parlé. Il m'a appris que, cette année, il avait eu lieu dans le Val de Loire. »
Les viticulteurs semblent donc d'importants vecteurs de la notoriété de toutes ces épreuves. Ils les font connaître au travers des macarons qu'ils collent sur leurs bouteilles, des diplômes qu'ils affichent dans leurs caveaux et en les mentionnant sur leurs tarifs.
Qu'en est-il de l'impact des médailles ? Provoquent-elles l'acte d'achat ? On aurait pu penser que, dans l'ensemble, les consommateurs rencontrés ce 29 mai allaient admettre que oui. Ils se sont tous en effet rendus à une dégustation ne réunissant que des vins médaillés d'or. Mais les choses sont loin d'être aussi simples, excepté pour Ludovic. « J'achète mes vins chez les cavistes et en grande distribution, indique ce chargé de communication dans le secteur du végétal. Comme beaucoup de consommateurs, je suis attentif au rapport qualité-prix. Si j'achète sans goûter et sans conseil, comme c'est le cas en grande distribution, la médaille prend de l'importance. Dans un linéaire, je compare les prix. Si j'ai le choix entre plusieurs vins d'une même appellation et dont le prix est comparable, mon choix va s'orienter vers les bouteilles primées. »
Jean-François est également client de la grande distribution (GD). « Enfin, c'est plutôt ma femme, sourit-il. C'est évident que les médailles attirent l'oeil dans un rayon de supermarché. En même temps, j'ai tendance à être prudent avec tout ce qui brille... Par nature et de par ma profession, je suis d'abord sensible aux AOC. »
Aurélien, de son côté, déclare faire peu de cas des médailles. Pour cet ingénieur de 33 ans, qui fréquente aussi bien la GD que les cavistes, « c'est surtout le bouche à oreille qui m'oriente vers un producteur plutôt qu'un autre. Et le prix ». Même opinion assez tranchée chez Aurore, paysagiste : « Pour moi, c'est la dégustation qui prime. C'est d'ailleurs ce que je viens faire à cette soirée : découvrir des vins et des viticulteurs. J'achète mes vins chez les vignerons et chez des cavistes. Les médailles, je ne m'en occupe pas. Surtout que les cavistes ne les mettent pas en avant. »
Un peu moins radical, mais tout aussi indifférent aux macarons, Jean-François achète peu de quantité à la fois, car il n'a pas de cave. « Pour les "grands" repas, je me rends chez un caviste avec mon menu, explique-t-il. Dans ce cas, médaille ou pas médaille, peu importe, je me laisse guider. Pour le reste, je fais confiance à un oenologue qui vit dans ma commune et qui me sélectionne des vins. »
Exclusivement client de vignerons - car il vit au coeur du vignoble angevin - Gaétan admet être paradoxal : « Je suis assez sensible aux médailles. Ainsi, je consulte les palmarès des concours pour voir si les vignerons que je connais en ont obtenu. Mais cela n'oriente pas mes achats. Les vignerons d'Anjou produisent au moins dix vins différents. Quand je m'y rends, c'est pour acheter un ou deux cartons de vins dont j'ai besoin. Le fait qu'ils aient obtenu des médailles sur d'autres cuvées que celles que j'ai prévu d'acheter ne m'incite pas à changer d'avis. En revanche, cela peut me donner envie de les déguster pour les découvrir. D'ailleurs, les vignerons dont je suis client n'oublient jamais de mettre en avant leurs récompenses. S'ils ont des médailles pour les vins que je leur achète, ça me conforte dans mes choix. »
Même curiosité chez Damien. L'enseignant regarde les résultats des concours quand ils lui tombent sous la main. « Je me fournis chez des vignerons, mais je ne sélectionne pas les vins parce qu'ils ont reçu des médailles. Je fonctionne, comme beaucoup, au bouche à oreille, et je profite de soirées comme celle-ci. »
Quant à la hiérarchie des médailles, Damien y croit : « Oui, naturellement l'or doit être le meilleur. » Jean-François et Gaétan se montrent plus mesurés. « J'imagine que, le plus souvent, la différence entre l'or et l'argent doit être assez mince », dit l'un. « Comme en sport, cela peut être très serré », imagine l'autre.
En revanche, mieux vaut éviter d'augmenter fortement les prix pour des médailles. « Je ne suis pas prêt à payer plus cher un vin médaillé. Tout simplement parce que je connais beaucoup d'autres très bons vins qui n'ont pas obtenu de médailles », souligne Damien. « Non, pas envie de payer plus », indique à son tour Gaétan.
Plus ouvert, ou plus aisé, Jean-François n'est pas choqué que les vins médaillés soient un peu plus chers : « C'est que la cuvée le mérite. D'autant que, dans cette région d'Anjou-Saumur, les vins sont très bien placés du point de vue de leur rapport qualité-prix. Je ne suis Angevin que depuis quelques années. J'ai découvert et apprécie les vins de la région. »
Et la promesse des lauréats ? Est-elle toujours tenue ? « Je n'ai jamais été déçu par un vin primé », assure Gaétan. « Cela a pu m'arriver, souligne Jean-François. Mais je ne m'arrête pas aux échecs. Je ne suis pas rancunier [rires]. À l'inverse, moi qui achète dans les foires aux vins en me fiant parfois aux médailles, je trouve toujours frustrant d'acheter un bon, voire un très bon vin, et de ne jamais le retrouver dans les rayons par la suite. »
Communiquer autour des médailles
Il y a bientôt dix ans, la dernière Fête de la fleur s'était arrêtée à Angers. Portée par l'interprofession, elle permettait à un public d'amateurs avertis de déguster les vins d'Anjou-Saumur médaillés au concours des Vins du Val de Loire. Depuis, plus rien. Même si l'idée était restée dans les têtes. Le 29 mai, Interloire a renoué avec cette tradition en organisant au forum du Quai, à Angers, de 18 heures à 21 h 30, une présentation au grand public des vins médaillés d'or au concours 2015 des vins du Val de Loire. Une trentaine de producteurs sont venus présenter une quarantaine de cuvées. L'opération a attiré quelque 500 amateurs, « dont beaucoup de jeunes », souligne l'interprofession, satisfaite de faire vivre ses médailles, et donc son concours.
À RETENIR
- Seuls certains consommateurs sont prêts à payer les vins médaillés un peu plus cher. Les autres n'acceptent pas une hausse des prix.
- Ceux qui achètent chez des vignerons sont rassurés de voir que leur fournisseur remporte des médailles. Certains prennent le temps de lire les résultats des concours pour voir si leur vigneron préféré en a glané.
- En premier lieu, les consommateurs citent, spontanément, le concours général qu'ils appellent « concours agricole ».
- C'est en grande distribution que les médailles prennent toute leur importance.
- En l'absence des conseils d'un vendeur, les médailles deviennent un critère important de choix pour les consommateurs.
- Chez le caviste, peu importe les médailles, ce qui compte, ce sont les conseils du vendeur.
