« LE NOM DE LA PIPÉRITONE EST APPARU POUR LA PREMIÈRE FOIS DANS LE MONDE DU VIN EN 2006, dans le cadre de la thèse d'Alexandre Pons sur le vieillissement prématuré des vins. À l'époque, on ne l'avait pas relié aux arômes de menthe », explique Stéphanie Marchand, enseignant chercheur à l'ISVV. C'est désormais chose faite, grâce à la thèse de Magali Picard, qui travaille sur le bouquet de vieillissement des vins de Bordeaux.
Pour l'heure, les chercheuses ont mesuré la concentration en pipéritone de vieux bordeaux rouges. Elles en ont trouvé entre 121 et 1 091 ng/l. D'après Stéphanie Marchand, les dégustateurs sont très inégaux devant cette molécule. « Dès lors, il est difficile de fixer un seuil de perception. »
Magali Picard va également essayer de comprendre les facteurs viticoles et oenologiques qui favorisent la synthèse de la pipéritone. « Aujourd'hui, on sait seulement que le cabernet-sauvignon est plus riche que le merlot, et que la pipéritone est davantage synthétisée lorsque la vigne est soumise à une contrainte hydrique légère à moyenne », explique Stéphanie Marchand.
Comment cette molécule a-t-elle été identifiée ? Tout est parti de la description du bouquet de vieillissement des vins rouges de Bordeaux réalisée par un jury d'experts (lire La Vigne n° 274, p. 54). Le caractère menthé est ressorti en bonne position, aux côtés des notes de truffe, empyreumatiques ou fruitées, pour lesquelles la plupart des molécules responsables étaient déjà connues.
Pour trouver celle qui se cachait derrière l'odeur de menthe, les chercheuses ont analysé plusieurs huiles essentielles de menthe sauvage et de menthe poivrée. Elles y ont identifié de fortes concentrations en pipéritone. Elles se sont alors concentrées sur cette molécule et ont fini par la retrouver dans des vins menthés. Désormais, avec la contribution du CIVB (Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux), elles s'attachent à faire toute la lumière sur son mécanisme d'apparition dans les vins rouges.