Les chercheurs comprennent de mieux en mieux comment l'homme perçoit les odeurs. On sait depuis longtemps que les molécules odorantes passent dans le nez, sont captées par les récepteurs olfactifs qui envoient un signal au cerveau, qui à son tour nous retourne une image olfactive. Jeune chercheuse au Centre des sciences du goût et de l'alimentation, à Dijon, Aline Robert-Hazotte se penche désormais sur le rôle des enzymes logées dans nos conduits nasaux.
« Des travaux avaient déjà montré que l'on trouve dans le nez les mêmes enzymes que dans le foie, chargées de détoxiquer le corps. À partir de là, des chercheurs se sont demandés si cette détoxication avait aussi lieu dans le nez, empêchant ainsi de saturer le système olfactif. C'est bien le cas, explique la doctorante, qui vient de recevoir le premier prix de la recherche Pernod Ricard ainsi que 10 000 € pour ses travaux. « Nous avons décidé de poursuivre ces études et de travailler ex et in vivo sur plusieurs molécules, aux odeurs de gras ou de fruits. Nous nous sommes rendu compte que les enzymes transforment ces molécules en d'autres composés, eux-même odorants. Cela signifie que la molécule n'obtient son odeur réelle qu'une fois que l'enzyme l'a transformée. Sans elle, nous ne sentons pas la même chose. La note olfactive ou l'intensité peuvent être différentes. » Ces nouvelles données viennent enrichir des travaux réalisés sur une molécule à l'odeur de framboise pour laquelle les chercheurs avaient déjà remarqué que la flagrance disparaissait lorsqu'ils désactivaient les enzymes.
Le Centre des sciences du goût et de l'alimentation planche actuellement sur différentes enzymes et molécules odorantes, dont beaucoup sont présentes dans les vins et responsables de parfums de fruits, d'épices ou de champignons. « Cela va nous aider à mieux décrypter la dégustation. Beaucoup d'odeurs arrivent dans le nez. Nous cherchons à comprendre comment elles entrent en compétition avec les enzymes », explique Aline Robert-Hazotte.