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DOSSIER - Bioprotection : les sulfites voient rouge

Michel Gassier, vigneron à Caissargues, dans le Gard « Une meilleure expression du terroir »

La vigne - n°300 - septembre 2017 - page 24

Michel Gassier expérimente la bioprotection avec un levain indigène. Il obtient des rouges plus complexes et plus aromatiques.
 © G. LEFRANCQ

© G. LEFRANCQ

« Pour mes cuvées haut de gamme, je cherche la meilleure expression du terroir. Plus on monte en gamme, plus le vin doit être unique », explique ce vigneron gardois basé à Caissargues où il produit des costières-de-nîmes et des vins de France. En 2015, il décide de miser sur la flore indigène. « Elle est plus sensible à la signature de mon terroir que les levures commerciales. Afin de la préserver, j'ai abandonné le SO2 en vinification. »

Depuis deux ans, il utilise un levain indigène pour la fermentation et la bioprotection de ses rouges haut de gamme. Pour ses entrées de gamme, comme il vise un profil aromatique plus reproductible d'une année sur l'autre, il continue à vinifier avec des LSA et en sulfitant à l'encuvage, par précaution.

Michel Gassier récolte ses meilleurs raisins à la main dans des cagettes qu'il refroidit dans une chambre froide que son frère arboriculteur met à sa disposition. Puis les raisins sont encuvés pour une macération préfermentaire à froid (9 à 10 °C), avec incorporation du levain pour les protéger, en l'absence de SO2, d'une contamination par une flore indésirable. Au bout de quatre à cinq jours, il laisse les températures remonter. Les fermentations démarrent alors spontanément.

En travaillant ainsi, il a « obtenu beaucoup plus de complexité, un fruit plus croquant, plus vibrant et plus de puissance aromatique. Ce résultat est certainement lié à l'absence de SO2. Mais les levures indigènes apportent également plus de complexité que les commerciales », assure-t-il. Tout en nuançant : « C'est une pratique à haut risque qui demande de la rigueur et de l'implication. Il faut déguster très régulièrement le levain et les cuves. Et il n'est pas dit que ce soit renouvelable pour tous les millésimes. »

En l'absence d'ajout de SO2 lors de la vinification, les malo se déclenchent plus rapidement. Autre bénéfice : « On obtient des vins moins SO2-dépendants. Le SO2 que l'on ajoute durant l'élevage ou avant la mise en bouteille est beaucoup plus efficace. On peut donc baisser les doses. Pour les deux derniers millésimes, je n'ai pas sulfité mes vins jusqu'en mars, avant le réchauffement printanier. Je suis tombé à 50 mg/l de SO2 total dans mes vins en bouteille. Depuis cinq ans, j'ai ainsi divisé par trois mes doses. »

Michel Gassier élabore son levain à partir de moût de raisins pressés à température ambiante et conservés à l'abri de l'air dans une cuve à chapeau flottant. Ces jus commencent à fermenter au bout de deux à trois jours. Il les déguste alors régulièrement pour vérifier l'absence de volatile ou de goûts suspects, puis les garde au froid et les débourbe avant de les utiliser. « Avec tous les levains que j'ai préparés pour ces deux millésimes, je n'ai jamais eu de problème. »

Michel Gassier se sert aussi de levains pour vinifier ses blancs. Comme les rouges, ceux-ci subissent une phase préfermentaire. Après pressurage et inertage, ils restent sur leurs bourbes pendant cinq à sept jours à 7-8 °C. Mais à la différence des rouges, le levain indigène n'est incorporé qu'à la fin de cette étape, après débourbage, pour lancer la FA. Le levain occupe vite l'espace et écarte la microflore indésirable. Là aussi, le vigneron estime obtenir des vins plus expressifs.

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