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À LA VIGNE - SEPTEMBRE

Peu de volumes mais de bons vins

MARION BAZIREAU - La vigne - n°301 - octobre 2017 - page 8

Après des vendanges compliquées, les vinifications, assez faciles, débouchent sur des vins prometteurs.

Dans les vignes gelées, les chantiers de vendanges n'ont pas été simples. En raison de la faible charge, des vignerons ont mis plus de 48 heures à remplir leurs cuves. « Croyant bien faire, certains ont fragmenté leurlevurage, alors que les raisins étaient riches en flore indigène après avoir macéré longtemps dans les bennes à vendange, remarque Daniel Granès, de l'ICV. Cette compétition a compliqué la fin de certaines fermentations. Il aurait mieux valu levurer à pleine dose dès le départ. »

Pour éviter ces pièges, des domaines ont pris les grands moyens. « Il a parfois fallu faire tourner quatre machines à vendanger dans une même parcelle », témoigne Julien Belle, oenologue dans l'Entre-deux-Mers et la Dordogne.

Heureusement, les accidents sont restés ponctuels grâce à la bonne fermentescibilité des moûts. « En trois jours, les densités étaient déjà tombées à 1020 alors que nous avons peu complémenté en azote », intervient Francine Calmels, oenologue à Gaillac. Un peu partout, les raisins sont rentrés équilibrés. « On a des TAP compris entre 12,5 et 13,5, et l'acidité s'est maintenue autour de 5 g/l », complète Fabrice Doucet, à la Sicavac.

Dans l'ensemble, les caves ont rentré de petites baies. Chez les rouges, couleur et structure ont été plus longues à venir qu'à l'accoutumée. « En Bourgogne, il a fallu trois semaines de cuvaison pour que les vins prennent de belles couleurs », relate Éric Pilatte. Cet oenologue espère qu'elles ne changeront pas pendant la fermentation malolactique. Quand les raisins manquaient de matière, il a conseillé aux vignerons de tanniser les vins.

La bonne fermentescibilité du millésime profite aussi aux bactéries. La malo s'enclenche souvent dans les trois jours qui suivent le décuvage. « C'est un peu plus long pour nos gamays primeurs du fait de leur pH à 3,3 », tempère Francine Calmels. Quand elle démarre, la malo va vite. Pour que les vignerons ne se laissent pas prendre de court par les bactéries, l'ICV leur conseille deux analyses par semaine.

Les premiers vins se présentent bien. « Les rouges ont un nez ouvert, sur le fruit mûr. Ils devraient vite être prêts à boire », illustre Martin Hallopeau, oenologue dans la Vallée du Rhône pour le laboratoire Laco. Les rouges du Centre sentent la cerise et ont gardé de la fraîcheur, contrairement à certaines cuvées de 2015 et 2016. « En Bourgogne, les pinots noirs qui ont macéré longtemps sont très réussis », se réjouit Éric Pilatte.

Presque partout, les blancs suscitent aussi un bel enthousiasme. « Ils dévoilent des notes d'agrumes et de fruits blancs. En plus, ils ont déjà beaucoup de matière en bouche », témoigne Christophe Marchais, oenologue pour LVVD dans le pays nantais, l'Anjou et la Vendée. Les chardonnays bourguignons sont bien gras. En Gironde, les vinifications ont été plus techniques mais réussies. « Les lies avaient tendance à fermer les vins. J'ai recommandé aux vignerons de les soutirer rapidement et de les oxygéner jusqu'à ce qu'elles prennent de belles notes de poire », détaille Julien Belle. Finalement, seul Martin Hallopeau est déçu par quelques vins. « Ils sont parfois assez lourds, avec des arômes de coing, de figue et même de miel. Les tartriquer n'a pas toujours suffi. »

Autre bémol, les raisins n'ont pas toujours donné les rendements en jus espérés. « Ils sont bons pour le chardonnay, le melon et le sauvignon, mais nous avons eu des mauvaises surprises avec le grolleau et le cabernet franc », regrette Christophe Marchais.

Antoine De Oliveira, gérant du Château du Bousquet (65 ha) et du Château Hourtou (27 ha), à Bourg, en Gironde « Nos cuvaisons vont pouvoir durer 30 jours »

« Nous ne produisons que du rouge. Nous avons lancé les vendanges le 15 septembre, quand quelques foyers de botrytis sont apparus après la pluie. Puis le beau temps est revenu et l'état sanitaire n'a plus décroché, sauf pour quelques grappes touchées par les vers, en bordure de nos propriétés - certainement à cause d'un manque de vigilance de nos voisins. Nous avons également dû rentrer du malbec touché par Drosophila suzukii autour du 25 septembre. Mais, pour le reste, nous avons pu attendre. Les vendanges se sont prolongées jusqu'au 4 octobre, alors que d'habitude elles ne durent qu'une douzaine de jours. Au total, nous n'avons rentré qu'une demi-récolte. Dans les vignes épargnées par le gel, les sucres ont grimpé jusqu'à 13,5 de TAP. Les raisins sont arrivés à parfaite maturité, avec de la couleur et des pépins bien croquants, tout en gardant de l'acidité. En revanche, nous avons chaptalisé des raisins issus des zones gelées à hauteur de 0,5 % vol. Nos cuves ont fermenté à un bon rythme, en perdant 10 à 12 points tous les jours. Nous avons complémenté les moûts en azote autour de 1050 car ils affichaient entre 50 et 80 mg/l d'azote assimilable. Les belles maturités nous autorisent des cuvaisons de trente jours. Les vins sont déjà très aromatiques, mêlant des notes florales et de fruits mûrs. Ils nous remettent un peu de baume au coeur. »

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