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DOSSIER - Matière organique : le retour

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CHRISTELLE STEF - La vigne - n°302 - novembre 2017 - page 36

Aux doses habituelles, les composts et les amendements organiques n'augmentent la vigueur et les rendements que dans les parcelles peu productives indique une étude de l'IFV.
JEAN-YVES CAHUREL, de l'IFV, a étudié, entre autres, l'épandage de compost de déchets verts, comme ici, dans le Beaujolais. © IFV

JEAN-YVES CAHUREL, de l'IFV, a étudié, entre autres, l'épandage de compost de déchets verts, comme ici, dans le Beaujolais. © IFV

Quel est l'impact des apports de matière organique sur la vigne et le sol ? Pour le savoir, l'IFV a mis en place un réseau national d'essais durant les hivers 2008-2009 et 2009-2010 avec la chambre d'agriculture du Vaucluse. Les parcelles sont implantées dans six appellations (Beaujolais, Costières-de-Nîmes, Fronton, Gaillac, Anjou et Côtes-du-Rhône). Dans chaque parcelle, les expérimentateurs ont apporté différents produits tous les quatre ans : du compost de déchets verts, du compost de marc et un amendement organique du marché. Ils ont comparé ces apports à la modalité « sarments broyés » qui sert de témoin. Ils n'ont pas utilisé d'autres fertilisants.

« Nous avons calculé les doses en fonction de l'augmentation du taux de carbone dans le sol que nous souhaitions et qui dépend du type de sol. Au final, ces apports sont comparables aux pratiques des viticulteurs », précise Jean-Yves Cahurel, de l'IFV pôle Bourgogne, Beaujolais, Jura, Savoie, qui coordonne les essais. Les doses varient ainsi de trois à cinq tonnes de matière sèche par hectare pour les composts du marché, de 4,5 à 28 t/ha pour le compost de déchets verts et de 1,5 à 13 t/ha pour les composts de marc. « Les composts du commerce sont souvent plus riches en matière organique que ceux de déchets verts et de marc. C'est pourquoi nous en avons apporté moins », commente Jean-Yves Cahurel.

Les expérimentateurs ont vu un effet dans deux situations seulement : en Anjou et dans les Costières-de-Nîmes. En Anjou, l'impact sur la vigueur et les rendements est même spectaculaire. Dans la partie désherbée mécaniquement en totalité, Jean-Yves Cahurel a noté une hausse de la vigueur de 35 % en moyenne en six à sept ans avec l'apport de Végéthumus (10,3 et 31,5 t/ha) et de 20 % avec l'apport de compost de déchets verts (27,9 et 28,7 t/ha). Même chose pour le rendement qui a augmenté de 46 % en moyenne avec l'apport de Végéthumus et de 31 % avec le compost de déchets verts. « Cette parcelle de cabernet franc plantée en 2000 est vraiment peu vigoureuse et le taux de matière organique dans le sol un peu en dessous de la moyenne », précise Jean-Yves Cahurel.

Dans la parcelle des Costières-de-Nîmes, dont la vigueur était également faible au départ, l'effet est moins flagrant. L'apport de compost de marc a entraîné une hausse de la vigueur de 20 % mais sans améliorer les rendements. Pourquoi ? Le technicien l'ignore. Une chose est sûre : dans les situations de faible vigueur les apports organiques ont un effet positif.

Autre enseignement de l'étude : les composts de marc sont riches en potassium. « Ils ont tendance à enrichir le sol avec cet élément. On en retrouve aussi davantage dans les pétioles et dans les baies. Par exemple, dans les Costières-de-Nîmes, on a dosé 30,4 g de potassium par kilo sec dans les pétioles de la modalité fertilisée avec du compost de marc contre 22,9 g/kg sec dans le témoin. Cette hausse n'a pas eu d'incidence sur la vigne. Cependant, dans les sols très riches en potasse, mieux vaut éviter les composts de marc pour ne pas induire de carences en magnésie », observe Jean-Yves Cahurel.

De leur côté, les composts de déchets verts sont plutôt riches en calcium. Ils ont donc tendance à augmenter le pH du sol. « De par leur effet de chaulage, ils seraient plus intéressants dans les sols acides. Toutefois, ces résultats préliminaires sont à confirmer », précise Jean-Yves Cahurel. Le technicien prévoit de publier une synthèse complète des résultats de cet essai fin 2018. Le temps pour lui d'exploiter et d'analyser les dernières données du sol.

Des besoins variables selon les sols

Les besoins en matière organique sont variables d'un sol à l'autre et selon les objectifs de rendement. Généralement, les sols viticoles renferment entre 0,5 et 2,5 % de matière organique. Viser plus haut est inutile et peut même poser un problème puisque la matière organique libère de l'azote en se minéralisant. En revanche, un taux inférieur à 1 % est aussi problématique. Le taux de matière organique dépend de sa vitesse de minéralisation. Il est donc plus faible dans les sols sableux que dans les argileux. Pour évaluer la teneur en matière organique d'un sol, on mesure sa teneur en carbone organique que l'on multiplie par un coefficient (1,72 en général).

Paramétrage d'un modèle en vue

Le réseau national d'essai mis en place par l'IFV a pour objectif de paramétrer le modèle AMG pour la viticulture. Ce modèle permet de suivre l'évolution du taux de matière organique dans le sol. Lorsqu'il sera finalisé, on pourra simuler l'impact à court et moyen terme des apports de matière organique sur le taux de matière organique du sol. Il sera possible de raisonner le choix du type de produits à apporter et les doses. Ce travail, réalisé en collaboration avec Agro-Transfert et l'Inra, fait l'objet d'un projet FranceAgriMer financé par le Casdar.

Cet article fait partie du dossier Matière organique : le retour

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