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VIN

Embouteillage GAI bichonne les rosés

MARION BAZIREAU - La vigne - n°302 - novembre 2017 - page 78

Avec les nouveaux becs électro-pneumatiques de GAI, il ne rentre pratiquement plus d'oxygène dans les bouteilles durant le tirage.
EMBOUTEILLAGE DE ROSÉ. La moindre entrée d'air lors de cette opération compromet la conservation des vins. © C. WATIER

EMBOUTEILLAGE DE ROSÉ. La moindre entrée d'air lors de cette opération compromet la conservation des vins. © C. WATIER

Depuis 2014, la société GAI équipe ses monoblocs d'embouteillage de becs électropneumatiques. Ceux-ci sont composés d'un canal de remplissage et d'un canal dédié au retour de gaz. Sur la partie inférieure du bec, quatre électrovannes s'ouvrent ou se ferment en fonction des instructions enregistrées par l'opérateur depuis une console de commande tactile.

Sur cette console, celui-ci peut programmer la désaération, le remplissage, le nivelage et l'inertage de l'espace de tête. « Contrairement aux technologies classiques, toutes ces opérations ont lieu sous le même bec, sans "lâcher de bouteille", relate Fabrice Plançon, directeur de GAI France. C'est notre innovation. Elle réduit quasiment à zéro l'entrée d'oxygène dans la bouteille. De plus, l'utilisateur peut désaérer (faire le vide) deux fois ses bouteilles, éliminant 98 % de l'air qu'elles contiennent. La cadence d'embouteillage ne diminuera que de 5 à 10 %. »

Pour avoir un avis neutre sur les performances de ses nouveaux becs, le fabricant a demandé à l'IFV et à Laure Cayla, du Centre du Rosé, de les tester. Des essais ont été mis en place de juin 2016 à juin 2017.

Les techniciens ont comparé deux machines de GAI : la 1305S, pourvue de huit becs mécaniques classiques, capable de remplir 1 400 bouteilles par heure, et la MLE661, dotée de six becs électropneumatiques d'une capacité de 1 000 bouteilles à l'heure. Ils ont d'abord fait des essais avec de l'eau désoxygénée. Une heure après l'embouteillage, ils ont mesuré l'oxygène dissous dans l'eau et celui présent dans l'espace de tête. Dans les bouteilles tirées sans inertage avec la tireuse classique, ils ont trouvé environ 1 mg/l d'oxygène dissous dans l'eau, et 2 à 3 mg/l dans l'espace de tête. En travaillant avec la même machine mais en inertant les bouteilles, la cloche et l'espace de tête, ces deux valeurs se sont améliorées : seulement 0,2 à 0,5 mg/l d'O2 dans l'eau et 1 à 1,5 mg/l d'O2 dans l'espace de tête.

Les meilleurs résultats ont été obtenus avec la nouvelle tireuse. Après une désaération, un tirage et un inertage sans lâcher de bouteille, l'eau ne renfermait que 0,05 à 0,1 mg/l d'O2 et l'espace de tête seulement 0,25 à 0,5 mg/l.

Par la suite, le Centre du Rosé a réalisé des essais sur huit rosés provenant de plusieurs régions viticoles et présentant des couleurs et des profils aromatiques différents. Ils avaient tous été désoxygénés avant le conditionnement. Ils ont été filtrés et sulfités autour de 25 mg/l de SO2 libre. Pour ne pas fausser les mesures, les techniciens ont choisi les mêmes bouteilles bordelaises et bouchons synthétiques que pour les essais avec l'eau.

Sans surprise, après le tirage, les teneurs en oxygène se sont révélées similaires à celles trouvées dans l'eau. Puis, 40 jours après l'embouteillage, les techniciens de l'IFV ont observé que l'oxygène dissous dans les vins et celui présent dans l'espace de tête avaient déjà été consommés. « Et la majorité des vins mis en bouteille avec la tireuse classique, sans inertage, présentaient déjà moins de 10 mg/l de SO2 libre. Le mal était fait. Trois mois plus tard, leur couleur était orangée. » En outre, ces vins ne renfermaient plus qu'une moyenne de 900 mg/l de CO2 contre 1 200 mg/l pour les vins protégés.

Tous les vins ont finalement été dégustés à l'aveugle par dix experts. Les rosés conditionnés avec les becs électropneumatiques ont été jugés plus frais, avec plus de notes d'agrumes. En comparaison, les rosés passés par les becs mécaniques sans inertage ont été notés plus amers et astringents. Leurs arômes se rapprochaient plus des fruits rouges que des agrumes.

« Ces essais ont confirmé que près de 60 % de l'oxygène total est emprisonné dans l'espace de tête, relate Fabrice Plançon. Bien l'inerter est donc crucial si l'on souhaite optimiser la durée de vie des vins. Et il faut garder en tête que, pour ces essais, tous les vins ont été désoxygénés et manipulés avec beaucoup de précaution avant l'embouteillage. Les écarts auraient sans doute été plus grands dans les vraies conditions de travail en cave. »

Le fabricant peut installer ces nouveaux becs électropneumatiques sur des monoblocs capables de conditionner entre 500 et 25 000 bouteilles de vin par heure. Il n'équipe pas les machines d'autres fabricants. Comptez 98 000 euros pour un petit monobloc de rinçage, tirage et bouchage équipé de becs électropneumatiques et d'un nouvel injecteur de CO2 (lire encadré ci-contre).

La crème de la crème

Avec ses becs électropneumatiques, GAI fait tomber les teneurs en oxygène emprisonné dans l'espace de tête à moins de 0,5 mg/l. Le fabricant peut désormais faire encore mieux. Il vient de développer un injecteur de CO2 électropneumatique que l'on positionne juste avant le bouchage. Cet injecteur plonge dans l'espace de tête jusqu'à la lisière du vin et remonte en injectant du gaz de façon à chasser l'air tout en inertant de manière très efficace. « Il permet d'inerter et de refaire le vide juste avant le bouchage et de rediviser par deux l'oxygène piégé dans l'espace de tête », explique Fabrice Plançon. Le Centre du Rosé doit bientôt le tester.

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